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Pour mieux planifier son activité il faut peut-être arrêter de croire à ses plans

[Cet article a été initialement publié dans la newsletter du 12 décembre 2021]

C’est tellement frustrant !

J’ai lancé Mille Mentors le 28 Mars. Je ferai un bilan la semaine prochaine de ces 8 premiers mois mais force est de constater que je n’ai pas été à la hauteur de mes ambitions.

Lorsque je me suis lancé cette activité, je pensais sortir 2 épisodes de podcast chaque mois (une interview et son débrief).
On en est loin : j’ai enregistré 5 interviews, 2 débriefs, et je n’ai publié que 3 épisodes.

Je peux l’expliquer par plein de bonnes raisons : les agendas sont bien chargés et c’est difficile de trouver des créneaux d’enregistrement, surtout pour les débriefs où on est nombreux. Le montage, la transcription des épisodes, et la création de la fiche web associée demandent beaucoup de temps et, pendant la même période j’ai eu une accélération de mes autres activités professionnelles … etc.

Bref, je pourrais me trouver plein d’excuses. Sauf que.

Sauf que ça serait crédible …
– si ça n’était pas une habitude chez moi.
– si ça n’était pas une habitude dans beaucoup d’entreprises.
– si ça n’était pas un travers de notre espèce.

Cette tendance à toujours surestimer les bénéfices ou les résultats de notre activité et à en sous-estimer les coûts ou les délais a même un nom : le planning fallacy.

Ce biais cognitif, qu’on appelle l’illusion de planification ou le biais de planification en français, a été caractérisé en 1977 par Daniel Kahneman et Amos Tversky (encore eux 🙂 en interrogeant des étudiants sur le temps estimé pour terminer leur thèse. Moyenne des réponses : 33,9 jours. (27,4 « si tout se déroulait le mieux possible », et 48,6 « si tout allait le plus mal possible »). Résultat ? 55,5 jours en moyenne et seulement 30 % qui ont rendu leur thèse dans le temps imparti.

Je ne fais pas mieux que ces étudiants, mais nous faisons tous les mêmes erreurs lorsque nous organisons des projets.

La logique voudrait qu’on prenne des marges mais ça ne marche pas. D’une part il y a une résistance psychologique incroyablement forte à planifier les retards des projets et d’autre part on sous-estime encore les marges nécessaires.

Comme le formule joliment l’auteur de Gödel, Escher, Bach dans sa «Loi de Hofstadter : Il faut toujours plus de temps que vous ne le pensez, même si vous tenez compte de la Loi de Hofstadter.»

La sagesse serait donc d’arrêter d’estimer le temps nécessaire et d’utiliser une des deux approches que marchent : la méthode du «Yesterday’s weather» (considérer que le plus probable c’est que ça prenne autant de temps que la dernière fois) ou l’avis du voisin (le planning fallacy ne s’applique qu’aux projets que l’en estime pour soi-même ; on est beaucoup plus lucide pour les projets des autres).

Pourtant, là encore, ça a beau être simple et connu, personne ne s’y résout. Il semble que nous n’arrivions pas à échapper à l’illusion que cette fois sera différente et que nous savons mieux que les autres le temps dont nous avons besoin.

La seule option viable est probablement d’accepter que les plans n’ont aucune valeur et de s’adapter aux circonstances comme elles se déploient. La vertu du plan étant alors surtout d’identifier les étapes vers le résultat et les interdépendances entres les sujets.

C’est que disait le général Eisenhower à propos de son commandement des forces alliées pendant la seconde guerre mondiale : «In preparing for battle I have always found that plans are useless but planning is indispensable

Et c’est pour ça que les approches agiles sont devenues indispensables pour réussir les projets complexes.

Ça tombe bien, c’est mon métier dans le civil.
Il faudrait peut-être que j’essaie pour le podcast 😉

Pour aller plus loin :


Ce texte a été originellement publié dans L’hebdo de Mille Mentors, le petit mail qui fait du bien le dimanche soir : une réflexion comme celle-ci, inspirée par l’actualité de la semaine, puis quelques pépites relevées dans ma veille et une pastille détente. Pour en profiter chaque semaine en avant-première, abonnez-vous.

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