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Le cadrage par la négative, une technique puissante

[Cette chronique a d’abord été publiée dans la newsletter du 2 mars 2024Abonnez-vous]

Dis, Papa, c’est loin l’Amérique ? 

Tais-toi, et nage

Cette blague, comme tant d’autres, repose sur le très léger temps que met notre cerveau à boucher les trous et sur l’effet de surprise que provoque notre compréhension retardée.

Si j’avais écrit « Alors, c’est l’histoire d’un père et son fils qui vont en Amérique à la nage. Ils sont au milieu de l’océan quand le fils demande : « Dis Papa, c’est loin l’Amérique ? ». Le père répond « Tais-toi, et nage » », ça n’aurait pas eu le même effet.

Diriger notre boîte, ou notre équipe, c’est pas une blague, mais on peut quand même se servir de la puissance des non dits.

Pour poser une vision, par exemple, ou définir un projet.

Combien de fois on m’a demandé de préciser ma vision, de définir ce que j’attendais.

« Mais j’en sais rien ! »

Si je demande à quelqu’un de travailler sur un sujet, c’est justement parce que je n’ai pas le temps de m’en occuper. Et, pour un travail créatif, comme écrire un article, construire une présentation ou imaginer un stand pour un salon, préciser ce que je compte obtenir c’est déjà faire le boulot. 

Pour détailler exactement ce que j’ai en tête, il faudrait déjà que je l’ai en tête, et donc que je fasse le boulot … que je cherche justement à déléguer. 

« Je ne sais pas, moi ! Utilise ton intelligence, fais-moi des propositions. » 

D’un autre côté je comprends mon collaborateur, échaudé par de précédents aller-retours où il a fait de son mieux pour me voir tout reprendre ensuite, parce que ça ne me convenait pas. 

Une technique très puissante c’est d’utiliser la réserve, comme en dessin.

Faute de savoir préciser le contenu, on peut détailler les contours et laisser l’imagination remplir les blancs.

Expliquer l’intention, la finalité et donner un cadre : des limites à ne pas dépasser, des minima, des maxima, que ce soit en termes de forme, de contenu, de délai ou de budget. Je ne suis pas sûr de ce que je vais obtenir, mais je suis à peu près tranquille que ça ne sera pas hors sujet, ni excessivement risqué.

Cette technique de la réserve, cet art des contours, on peut également la décliner dans les conversations difficiles, dans l’organisation du travail, dans le positionnement : 

Plutôt que de lister les sujets prioritaires, que tout le monde a déjà bien en tête, lister tous les chantiers et dossiers que l’on va arrêter, ou suspendre, pour faire de la place aux priorités.

Plutôt que de répéter ad nauseam les mêmes explications vagues sur ce que l’on fait pour nos clients, qui ne sont pas différentes de ce que disent nos concurrents puisque, par définition, on fait le même métier, mettons plutôt l’accent sur ce que nous ne faisons pas, ce à quoi nous renonçons et qui sont pourtant des habitudes de la profession, puisque c’est ça qui nous différencie. 

Plutôt que d’expliquer au prospect pourquoi il devrait travailler avec nous, lui dire quand et pourquoi il ne devrait pas travailler avec nous, et lui laisser deviner le reste.

Plutôt que de tout lui expliquer, l’inviter à l’imaginer.

Et, plutôt que de faire une longue chronique démonstrative, partager une idée et laisser les lecteurs lui trouver des déclinaisons pratiques 😉

(vous me raconterez ?)


Ce texte a été originellement publié dans L’hebdo de Mille Mentors, le petit mail qui fait du bien le dimanche soir : une réflexion comme celle-ci, inspirée par l’actualité de la semaine, puis quelques pépites relevées dans ma veille et une pastille détente. Pour en profiter chaque semaine en avant-première, abonnez-vous.

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