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Intelligences artificielles et management: Est-ce que je vais me faire virer ?

[Cette chronique a d’abord été publiée dans la newsletter du 2 octobre 2022Abonnez-vous]

Cette semaine j’ai demandé à Jenny de me proposer une chronique. C’était aussi un risque car, si elle est meilleure que moi, je risque de me faire virer.

Voici ce que Jenny a écrit :

La dynamique des petites entreprises est en constante évolution et le défi pour les dirigeants est de garder une longueur d’avance.

De nombreux entrepreneurs se concentrent presque exclusivement sur les ventes ou l’efficacité opérationnelle et n’ont pas reconnu l’importance de la planification stratégique pour façonner l’avenir de l’entreprise.

Cette ligne de conduite est souvent contre-productive et conduit finalement à plus de problèmes à l’avenir.

Afin d’éviter de refaire la même erreur, il est essentiel que les dirigeants prennent le temps de prendre du recul et de réévaluer la stratégie actuelle avant d’entreprendre toute action.

Voici quelques stratégies qui peuvent vous aider à rester sur la bonne voie lorsque la pression est forte :

  1. Reconnaître les signes avant-coureurs et prendre des mesures préventives avant qu’il ne soit trop tard
  2. Faire passer les besoins des clients en premier et ceux de l’organisation en second lieu

[…]

Vous êtes peut-être en train de vous demander si j’ai fait un AVC, ou si c’est Alzheimer précoce car j’ai déjà traité ce thème il y a deux semaines.

Et vous avez raison, mais je ne suis pas subitement devenu gaga.

Ce texte ce n’est pas moi qui l’ai écrit.

C’est Jenny. Enfin Jenny and friends. On va voir ça.

Des intelligences artificielles bluffantes

Jenny est une intelligence artificielle qui produit du texte à partir d’une demande en quelques lignes.

En l’occurrence, pour tester l’outil, je lui ai demandé de rédiger un article de blog sur le thème «préserver les objectifs stratégiques à long terme au milieu de la gestion de crise à court terme» en donnant quelques astuces pratiques.

La version gratuite étant limitée à 500 mots je n’ai pas pu aller bien loin mais c’est déjà suffisant pour voir à quel point les résultats sont impressionnants.

Pour être précis, ce que vous avez lu ici n’est pas exactement ce que Jenny a produit car elle travaille en anglais.

J’ai fait appel à Deepl, une autre IA, pour la traduction. Et comme la version gratuite de Jenny n’autorise pas le copier/coller, j’ai utilisé Siri pour dicter à Deepl (en anglais, avec mon pauvre accent) ce que Jenny avait écrit, afin de le traduire en français.

Et, enfin, j’ai utilisé Dreamstudio pour générer une image sur le thème «a boss looks anxious and perplexed».

Le résultat que vous avez découvert est donc le résultat combiné de 4 logiciels, 4 intelligences artificielles : la première est un générateur de texte, la deuxième reconnait le langage parlé, la troisième est un genre de C3PO en ligne, capable de traduire 29 langues et la dernière un générateur d’images à partir de descriptions.

C’est bluffant, non ?

C’est bluffant mais, en tant qu’entrepreneurs, en tant que managers et en tant que citoyens, ça mérite de s’y attarder quelques minutes.

Adopter la nouveauté

On pourrait être tenté de rejeter cette nouveauté.

Quand on voit le texte ci-dessus, c’est assez tentant de se dire que l’IA ne fait qu’assembler des lieux communs et ne produit aucune idée nouvelle.

Je l’avoue, ça a été ma première réaction.

Mais c’est pas très malin.

D’une part, quand on voit la vitesse à laquelle ces technologies évoluent, on doit bien admettre que les probabilités sont grandes que les machines soient bientôt capables de faire mieux que nous.

Et, honnêtement, combien de fois produisons-nous de véritables idées originales plutôt que de recycler un fond de lieux communs de notre milieu social et culturel ?

D’autre part ça serait comme refuser le tracteur à l’époque de la charrue à bœufs, en arguant que celle-ci tasse moins la terre. Courageux et noble, mais voué à l’échec.

On ne peut pas lutter contre la diffusion d’une avancée technologique.

L’Intelligence Artificielle fait des progrès fulgurants, ça va bouleverser des industries et il faut s’y intéresser.

Surtout que, comme à chaque fois qu’une nouveauté perturbe un marché, les plus rapides à s’en saisir sont aussi ceux qui vont en profiter pour gratter des places dans la course au soleil.

Intelligences Artificielles: les cadres de demain ?

Pour l’instant j’ai l’impression que les usages restent limités. Certes ces logiciels sont déjà capables de créer du texte pour enrichir votre référencement en densifiant votre cocon sémantique, d’allonger vos description produits ou de démultiplier votre présence sur les réseaux sociaux, mais tant que les textes restent un peu bateaux, ça n’a pas une grande valeur.

C’est probablement dans l’interaction entre l’humain et la machine que les possibilités les plus intéressantes vont apparaître.

Je pourrais sans doute un jour dicter à mon IA les idées clés de ma chronique ou d’une réunion avec un prospect et celle-ci se chargera de les transformer en texte complet, que je pourrais alors reprendre pour lui donner une tournure plus personnelle, peut-être en m’appuyant de nouveau sur l’IA pour trouver des exemples ou enrichir ma recherche.

GPT3, l’algorithme de la société OpenAI qui est sans doute à ce jour l’IA de génération de texte la plus avancée, incorpore déjà des fonctions d’analyse des émotions dans un texte, ou d’interprétation symbolique et analogique qui donnent une idée de ce qui sera faisable demain.

Elle est, par exemple, capable de compléter la phrase «Les questions sont comme des flèches…» en répondant «…parce qu’elles pointent les problèmes à résoudre».

On peut donc parier que résumer un texte, faire un compte-rendu de réunion, préparer une synthèse powerpoint des éléments financiers clés… toutes ces tâches «complexes» pour lesquelles on emploie aujourd’hui des cadres bien payés vont devenir des fonctions instantanées de nos assistants numériques.

Face au progrès, remontons notre niveau d’exigence

En attendant de devenir comme une sorte de Steve Austin (l’homme qui valait trois milliards !) intellectuel, cela pose quelques questions, comme managers :

À quel moment on va commencer à se demander si nos collaborateurs font le boulot eux-même ou le sous-traitent à une IA ?

Et, si c’est le cas et que le résultat nous convient, pourquoi pas ? Et sinon, pourquoi on accepte ce qu’ils produisaient jusqu’ici ?

Est-ce qu’on vise un niveau de qualité ou un niveau d’effort ?

Je trouve que ce sont des questions intéressantes à se poser.

À quand les NFT qui apportent la garantie «made by people» ?

L’intelligence artificielle va commoditiser les productions intellectuelles et artistiques banales.

On peut s’en servir, mettre des collaborateurs au chômage … et inonder le monde de contenus bateaux.

Ou on peut remonter notre niveau d’exigence, vis-à-vis de nos productions et vis-à-vis du service que nous rendent les IA.

Restons inventifs

Lorsque nous chercherons à réfléchir à un problème, peut-être que les machines pourront nous challenger, nous apporter des points de vue contradictoires et nous aider à trouver les meilleurs arguments.

Car je n’aimerai pas que notre avenir ressemble à Wall-e ou Matrix : des hommes nourris par les machines qui gèrent le monde et nous distraient pour nous maintenir dociles.

(un patron angoissé, vu par Dall-E)

Ou, si l’on regarde au contraire dans le passé, comme les romains qui ont cessé d’être inventifs quand les esclaves apportés par leurs conquêtes ont rendu la vie si facile pour les patriciens.

Pour que l’innovation soit également un progrès, ne l’utilisons pas comme un fauteuil pour se reposer mais plutôt comme un marchepied pour atteindre de nouveaux sommets de création et de génie.

Et, si nous choisissons cette voie, pourquoi attendre que les machines nous y obligent ?

Pour aller plus loin :

Les principales IA du moment :

Quelques applications spécifiques :

  • Le compte Instagram de Alper Yestias qui utilise l’IA pour générer des portraits photoréalistes de stars décédées jeunes, telles qu’elles seraient peut-être si elles avaient vécu jusqu’à aujourd’hui. De Janis Joplin à Freddy Mercury en passant par Lady Diana ou Kurt Kobain. Étrangement touchant.
  • Stock AI utilise l’intelligence artificielle pour trouver la bonne photo dans les banques d’images ou la créer si elle n’existe pas.
  • Auxi.ai : une intelligence artificielle pour améliorer le design de vos slides powerpoint

Les dernières (ou les prochaines) avancées dans le domaine :


Ce texte a été originellement publié dans L’hebdo de Mille Mentors, le petit mail qui fait du bien le dimanche soir : une réflexion comme celle-ci, inspirée par l’actualité de la semaine, puis quelques pépites relevées dans ma veille et une pastille détente. Pour en profiter chaque semaine en avant-première, abonnez-vous.

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