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Comment ne pas être un bon manager

[Cette chronique a d’abord été publiée dans la newsletter du 11 juin 2023Abonnez-vous]

Les barbecues sont souvent pour moi une occasion de prendre la température ambiante en termes de management.

Celui de samedi dernier en a encore été l’illustration puisque j’ai discuté avec Amélie de sa collaboratrice qui ne fait pas le boulot, puis que j’ai été interpellé, en rebond, par Charles qui me lit ici et qui me dit :

« J’ai l’impression que tu as durci le ton en management dans tes chroniques, non ? Tu penches plutôt du côté des patrons, ces temps-ci, après avoir été plus souvent du côté des salariés. »

Le job du manager

Ça m’a étonné, et amusé, car ce n’est pas du tout comme ça que je me positionne, ou que je réfléchis.

Et, du coup, ça m’a immédiatement donné envie de faire un petit schéma pour parler, une nouvelle fois, de ce que je crois être le bon management.

Je le répète souvent, le job d’un manager c’est de faire en sorte que l’entreprise puisse compter durablement sur les résultats de son équipe. Ce n’est donc pas de faire le bonheur de ses collaborateurs, ni de les fliquer.

Le job du manager c’est de construire une performance collective durable.

Tous les mots sont importants : la performance exprime le degré d’atteinte des résultats, ceux-ci sont le fruit d’une bonne coordination de l’équipe et ils sont obtenus par des moyens qui permettent, voire facilitent, la tenue de cette performance dans le temps.

J’avais déjà évoqué la question des résultats attendus dans une chronique récente sur la sous-performance et je ne vais pas y revenir ici. On peut cependant constater qu’avec cette définition il est facile de vérifier si un·e manager fait le job :

– Est-ce que les résultats sont là ?
– Est-ce que les résultats sont durables ou est-ce qu’ils ont été atteints, à la dure, par une équipe pressée, stressée, usée ou, pire, par des voies non éthiques ?

Les deux dimensions du manager

Le sujet sur lequel je voudrais revenir aujourd’hui, pour répondre, en quelque sorte, à la question de Charles, c’est celle de l’attitude du manager pour construire ces résultats.

Je propose de regarder deux dimensions de son comportement : l’attention portée aux résultats et l’attention portée aux personnes.

Les deux dimensions du manager: l'axe d'attention aux personnes et l'axe d'attention aux résultats

On comprend aisément que s’il n’y a pas d’attention aux résultats il n’y aura pas de résultats et que, puisque ceux-ci sont produits par les personnes de l’équipe, s’il n’y a pas d’attention portée aux collaborateurs, les performances ne seront pas durables.

Je crois que c’est quand même un tout petit peu plus subtil.

Première dimension: l’attention aux résultats

Prenons la dimension de l’attention portée aux résultats. L’absence d’intérêt pour les résultats est évidemment problématique mais l’excès de focalisation sur ceux-ci, quel qu’en soit le prix pour l’équipe ou l’entreprise, l’est tout autant. Il y a une zone idéale où les résultats sont une obsession du manager mais pas au point de lui faire perdre de vue le contexte et la situation des personnes.

Les dimensions du manager: l'axe de l'attention aux résultats

Deuxième dimension: l’attention aux personnes

De la même façon, l’indifférence à ce que vivent les collaborateurs n’est pas saine. Je me suis récemment « fâché » avec un prospect que je rencontrais pour la première fois et qui m’exposait sa problématique avec un choix de mots qui donnaient le sentiment d’un mépris pour ses collaborateurs. J’ai fini par l’interrompre pour lui dire que les salariés ne sont pas des bonhommes Playmobil™, tous indifférents et interchangeables et que ses difficultés managériales provenaient sans doute de son mauvais management.

Mais si beaucoup de managers comprennent aisément que l’on ne peut pas manager en ignorant les sentiments et les motivations de son équipe, l’excès inverse n’est pas tellement mieux.

Et la mode actuelle des Chief Happiness Officers ou l’insistance de la QVT (Qualité de Vie au Travail) masque souvent une autre forme de mépris pour la responsabilité individuelle : celui qui se substitue au salarié pour son propre bien et viré au paternalisme.

Les dimensions du manager: l'axe de l'attention aux personnes

Là encore, je crois que la justesse est dans la mesure. La considération pour ses collaborateurs, l’empathie qui permet de comprendre ce qu’ils ressentent sont d’excellentes choses. Lorsque l’empathie devient sympathie et que le manager ne sait plus dissocier ce que ressentent ses équipiers de ce qu’il vit lui-même, alors il perd sa capacité de recul et d’action sur le système. Il n’est plus en position de tirer l’équipe vers la performance attendue et se met lui-même en difficulté.

Une façon d’être bon manager…

En croisant ces deux axes on voit alors clairement où se situe le bon manager : dans une attention constante aux résultats ET dans la considération empathique pour ses collaborateurs.

Le bon manager se situe dans la zone de forte attention aux résultats, et de considération empathique pour les personnes.

C’est parce qu’il met l’équipe au service des objectifs et qu’il sait trouver chez chacun et dans la dynamique collective les compétences et les ressorts de motivation qu’il construit une performance collective durable.

… et neuf façons d’être mauvais

Et s’il y a une zone claire de management sain, fort, performant, il y a en revanche de multiples manières d’être un mauvais manager :

  • On peut s’occuper tellement de son équipe qu’on en oublie les résultats
  • On peut s’occuper tellement des résultats qu’on en oublie son équipe
  • On peut croire que les résultats s’obtiennent contre l’équipe et devenir un tyran, ou un cynique
  • On peut se préoccuper tellement des résultats ET de son équipe qu’on s’en oublie et qu’on termine en burnout
  • On peut baisser les bras et se désintéresser à la fois de l’équipe et des résultats.
  • … et tant d’autres encore
Neufs façons d'être un mauvais manager: tyrannique, cynique, saboteur, démissionnaire, copain, syndicaliste, protecteur, burn-out.

Ou alors on peut prendre le soin et le temps de se former, vraiment, au management pour apprendre à aller chercher les résultats en mobilisant son équipe sans la brutaliser et sans se mettre soi-même en danger.

On peut choisir de devenir un vrai manager, professionnel.

Merci Charles pour cette question qui m’a permis de poser ce nouveau modèle pour évaluer votre management ou vos managers.

J’espère qu’il vous sera utile et, non mon cher Charles, je ne suis ni du côté des salariés ni du côté des patrons, je suis du côté de la performance collective durable.

Pour aller plus loin:
  • Vous pouvez bien évidemment vous former au management. Si vous travaillez dans la tech je ne peux bien évidemment que vous recommander les excellents parcours de formation au management de Goood. Contactez Carole ou Maria de ma part, elles vous feront bon accueil et un bon prix 😉
     
  • Alternativement je vous conseille les form’actions en ligne de Cédric Watine sur Outils du Manager.
     
  • Vous pouvez également lire (ou écouter en audio) l’excellent En toute franchise, de Kim Scott. Un très bon bouquin concret sur la pratique du management tel qu’elle l’a développé chez Google et l’enseigne depuis. Les idées et les pratiques sont très proches de ce que je raconte ici ou de ce que nous défendons chez Goood.
     
  • Si l’audio est votre canal de prédilection, je vous propose le 5ème épisode du podcast Philosophy Is Sexy où l’excellente Marie Robert interroge la question de la performance.
     
  • Enfin je vous propose un petit détour par Brooklyn, à l’occasion d’un reportage du New-York Times. Pendant 5 jours la police se met en retrait et ce sont des citoyens volontaires qui interviennent en première ligne. Un récit qui offre une illustration inattendue d’un principe clé en management : ce ne sont pas les galons hiérarchiques qui font l’autorité. « C’est quelqu’un qui est comme moi, qui me comprend et qui m’interpelle sur le fait que je suis un peu à la rue. »
    What Happened When a Brooklyn Neighborhood Policed Itself for Five Days – The New York Times

Ce texte a été originellement publié dans L’hebdo de Mille Mentors, le petit mail qui fait du bien le dimanche soir : une réflexion comme celle-ci, inspirée par l’actualité de la semaine, puis quelques pépites relevées dans ma veille et une pastille détente. Pour en profiter chaque semaine en avant-première, abonnez-vous.

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