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Adapter son entreprise à l’arrivée des IA

[Cette chronique a d’abord été publiée dans la newsletter du 2 avril 2023Abonnez-vous]

Il y a exactement 6 mois je me demandais dans une chronique mi-sérieuse mi-ironique si j’allais un jour me faire virer par une IA. Aujourd’hui je le sais.

Six mois c’est long, dans la période actuelle d’effervescence technologique, et cette demie année a vu fleurir les sorties de produits, les prédictions les plus invraisemblables, et les contenus les plus divers. Le sujet a envahi l’espace médiatique et nourrit les conversations inquiètes de monsieur tout le monde.

Et c’est vrai que la vitesse à laquelle cela bouge rend le sujet à la fois fascinant et un peu inquiétant.

Pour autant j’ai aujourd’hui la réponse à ma question d’octobre : non je ne vais pas me faire virer par une IA. Je vais me faire virer par un humain… qui utilisera mieux l’IA que moi.

Choisir la bonne approche face à l’arrivée des IA

Est-ce que l’IA peut être meilleure que moi dans mon boulot ?

C’est pas la bonne question. Formulée ainsi, la question nous compare à l’IA, elle nous place sur le même plan que les machines.

Ça n’a aucun sens et c’est la mauvaise manière de poser le problème.

Le vélo n’est pas meilleur que l’homme, par contre l’homme à vélo va plus vite que l’homme à pied.

Comme entrepreneurs, comme dirigeants, et même comme citoyens, notre enjeu c’est d’évoluer pour intégrer ce changement dans notre environnement.

On me dit qu’un cabinet d’avocats a récemment licencié deux collaboratrices qui s’étaient servies de ChatGPT pour préparer les documents pour un client. Si c’est réellement arrivée et que la raison du licenciement c’était qu’elles avaient utilisé ChatGPT, je trouve ça idiot.

C’est comme si on virait un bûcheron parce qu’il a utilisé une tronçonneuse au lieu d’une scie.

La question c’est pas l’outil, c’est le résultat.

Embrasser l’utilisation d’IA pour plus de compétitivité

Nous avons tout intérêt à ce que nos collaborateurs s’approprient ces outils pour travailler plus vite et mieux que nos concurrents.

Par exemple, pour préparer cette newsletter, je parcours plusieurs dizaines d’autres newsletters et une douzaine de sites, journaux et magazines (Les échos, Le Monde, la Harvard Business Review, Usbek et Rica, Welcome to the Jungle…). J’essaie de diversifier mes sources mais je suis contraint par le temps à me concentrer sur les 20% des sources où je trouve 80% des informations les plus utiles. C’est limitant et ça crée forcément des biais.

Demain, une IA pourrait m’aider à balayer une bien plus grande quantité de contenus pour repérer les signaux faibles et les pépites les plus intéressantes.

Aujourd’hui, déjà, je me sers de Chat GPT 4, pour lequel j’ai souscris un abonnement, afin de faire des résumés rapides de certains articles qui me permettent de décider si je vais les lire ou pas. Je gagne un temps fou. Si je parviens à le coupler avec l’application de lecture dans laquelle j’enregistre les articles que j’ai dénichés en fouinant, je vais encore gagner en productivité.

Je reconnais que les performances de ces outils sont impressionnantes et pourraient donner à penser que nos emplois vont disparaître.

L’IA ne remplacera pas l’humain

Nos métiers, sans doute, nos emplois c’est moins sûr.

Il n’y a plus de porteurs d’eau à Paris depuis qu’il y a l’eau courante mais il y a des milliers d’autres emplois qui n’existaient pas à l’époque.

Et nous n’en sommes pas encore là. Aujourd’hui l’intelligence artificielle va plus sûrement modifier notre travail que le remplacer.

L’IA peut nous aider à digérer et analyser des notes d’entretiens et même repérer des patterns que l’on n’avait pas vu. En revanche on est encore loin de d’intelligence relationnelle d’un bon chef de produit, commercial, consultant ou manager qui interprète le non verbal, le ton de voix, les silences, les regards… pose des questions hors script ou s’appuie sur ses propres émotions pour mieux discerner ce qui se passe.

Aujourd’hui les outils les plus «intelligents» peuvent encore sembler cons comme une poule par ignorance du contexte. Ça va changer, bien sûr, car les logiciels vont évoluer. Mais, de la même façon que Google ne renvoie pas les mêmes réponses à la requête «président» selon que vous avez déjà fait des recherches sur le marché du beurre où sur l’actualité politique, leur compréhension de vos intentions reste une savante devinette aidée par le passé et l’actualité.

Jusqu’à ce qu’on crée les technologies de lecture dans les pensées, les meilleurs résultats seront obtenus par celles et ceux qui comprennent sur quoi s’appuie la machine et formulent des demandes précises.

C’est pour ça qu’on voit apparaître des répertoires de «prompts» pour chatGPT ou des freelance qui proposent leurs services pour rédiger les commandes de génération d’images avec MidJourney ou StableDiffusion.

Se conforter dans le déni, c’est le meilleur moyen de se faire dépasser

Pour ne pas être dépassés par l’évolution de la technologie, pas d’autre choix que de s’y intéresser.

Comme dirigeants ça doit nous inviter à deux choses :

  1. développer les dimensions humaines, interactionnelles et adaptatives de nos entreprises car ce sont celles qui seront les plus difficiles à remplacer par des IA
  2. organiser la montée en compétence de nos collaborateurs sur le sujet, car, bien avant d’être remplacés par des IA, nous serons mis hors marchés par des concurrents qui les utilisent intelligemment.

Le plus idiot pour nous qui dirigeons des entreprises serait de céder à la tentation du déni en se disant que c’est pas pour nous, que nos business ne sont pas concernés.

Quelques industriels du 20ème siècle le pensaient aussi à l’arrivée d’internet et du e-commerce.
Sauf qu’ils ne sont plus là pour nous raconter qu’ils avaient tort.

Comme disait la fable de La Fontaine : «ils ne mourraient pas tous, mais tous étaient touchés».

Je préfère être du côté de ceux qui s’adaptent que de ceux qui meurent héroïquement en résistant.

Pour aller plus loin:

• Une revue courte et illustrée par des exemples, des évolutions de ChatGPT 3.5 à 4
10 Ways GPT-4 Is Impressive but Still Flawed

Celle qui m’épate le plus ? L’interprétation d’images :

ChatGPT utilise l'IA pour analyser une image d'un frigo rempli et proposer des recettes à partir des ingrédients dans le frigo

• Un article de HBR publié cette semaine présente un cadre utile pour les entreprises cherchant à comprendre les opportunités de produits et les menaces de marché de la technologie d’IA générative qui alimente des outils tels que ChatGPT et Bard. Il propose une matrice 2×2 qui vous aidera à identifier les applications les plus utiles et les moins risquées pour votre entreprise. Par exemple, l’utilisation de la technologie pour rédiger des textes de marketing ou effectuer des révisions de code peut être une opportunité précieuse et peu risquée, alors que son utilisation pour des conseils médicaux spécialisés pourrait être très risquée et peu gratifiante.

A Framework for Picking the Right Generative AI Project

Schema sur les opportunités de produits et les menaces de marché de la technologie d'IA générative, afin d'adapter son entreprise aux IA

Microsoft a recours à ChatGPT pour renforcer son offre de cybersécurité : Microsoft Secure. Dénommée Microsoft Security Copilot, sa nouvelle solution peut être utilisée de deux manières : (i) en tant que robot conversationnel pour aider à prioriser les recherches sur les menaces et les divulgations de vulnérabilités et (ii) en tant qu’assistant pour déterminer l’étendue des cyber-incidents en cours sur un réseau
(source : Superception)

• Un peu inquiétant en revanche, l’utilisation de l’IA pour générer du contenu personnalisé dans les jeux vidéos en s’appuyant sur l’historique de jeu et les préférences du joueur. Ça risque de devenir toujours plus addictif. Ready Player One ?

• Un débat : certains chercheurs affirment que les chatbots ont développé une théorie de l’esprit. Mais s’agit-il simplement de notre propre théorie de l’esprit ?
Can a Machine Know That We Know What It Knows?


Ce texte a été originellement publié dans L’hebdo de Mille Mentors, le petit mail qui fait du bien le dimanche soir : une réflexion comme celle-ci, inspirée par l’actualité de la semaine, puis quelques pépites relevées dans ma veille et une pastille détente. Pour en profiter chaque semaine en avant-première, abonnez-vous.

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